Les garçons ne pleurent pas

 

Parce qu'un homme se doit d'être viril et de dominer ses émotions.

Parce que les femmes craqueraient pour les grands durs aux bras protecteurs et les bad boys un peu machos.

Parce qu’un homme doit être le pilier, robuste et inébranlable, sur lequel une compagne ou une famille peut s'appuyer.

Parce qu'un homme en a.... un homme, ça ne doit pas pleurer.

 

Par Aouatif ROBERT | psytherapieparis.fr

« Tu ne pleureras point »


Les injonctions parentales (« sois fort », « sois courageux », « tu es un homme, ne pleure pas mon fils ») apprennent aux jeunes garçons à taire leurs sentiments, à réprimer leurs ressentis et prendre sur eux si ça va mal. Pour éviter les moqueries et ne pas décevoir ses parents, l’enfant se conditionne pour refouler ses émotions et ses larmes.

Associée à la vulnérabilité, les pleurs ne sont évidemment pas une caractéristique masculine. Un vrai homme ne montre pas ses faiblesses, peu importe les sentiments éprouvés ou difficultés rencontrées.

À trop contenir ses larmes, la mélancolie de Marco, 35 ans, le prend parfois aux tripes. Sa gorge se noue, son poing se serre et il lui faut alors trouver une soupape pour ne pas sombrer dans le désespoir ou une rage folle. De peur que ses larmes ne débordent, que le volcan d’émotions contenues ne l’engloutisse, Marco tape le soir sur son punching-ball et ouvre une bouteille de vin.

Le code des garçons *
* expression de William Pollack, « Les vrais garçons : sauver nos garçons des mythes de la petite enfance


Pour s’écarter de traits féminins telle que la sensibilité ou l’empathie, le mâle se doit de demeurer stoïque et indépendant. Avoir la larme à l’œil, c’est interdit : « ce sont les filles qui pleurent ». Et ce message est souvent renforcé par les camarades de classe, les proches, les clichés sportifs ou culturels. La fille apprend à être gracieuse et à aimer le rose, le garçon à encaisser les coups et à se battre.

 

Ayant intériorisé le mythe des stéréotypes de genre selon lequel une femme est fragile et un homme est fort, beaucoup ne sont pas tendres avec les plus sensibles (et souvent encore moins avec eux-mêmes) : un homme qui pleure devrait avoir honte. Ceux qui ne suivent pas le code des garçons sont désavoués. Ressentiment, haine et dégoût des autres, ou de soi, peuvent survenir. Certains tendent jusqu’à un modèle de masculinité « toxique », marquée par un désir de dominer et contrôler.


S’il devient socialement acceptable pour un mâle de partager ouvertement ses sentiments, pleurer en public n'est pas encore admis, hormis la dérogation à verser une larme pour la naissance d’un enfant.

 

Être un homme... sensible


N
ombre d’hommes accordent trop peu d’attention à leurs ressentis et ne savent pas comment faire face aux émotions négatives auxquelles ils sont confrontés, ce qui amplifie leur souffrance et leur confusion. S’interdire de lâcher prise et de se laisser aller aux larmes, c’est retenir un fardeau qui peut devenir trop lourd à porter et engendrer stress, malentendus, frustrations, épisodes dépressifs, et violence.

 

Sylvain s’est longtemps senti gelé de l’intérieur. Il se montrait jovial, travailleur, mais c’est comme si son cœur était anesthésié. « Seuls les femmes ou les lavettes pleurent », lui disait son père. Puis sa mère est morte sans qu’il ait pu se blottir dans ses bras, et il a pleuré toutes les larmes de son corps, jours après jours. Il a pleuré sa peine, sa colère, sa rancune, sa déception, son amertume.


Éduquer des garçons heureux


Chaque individu (fille ou garçon) devrait avoir la liberté d’être, de penser et d’aimer ce qu’il veut. Élever des enfants bien dans leur peau, à l’aise avec les autres et leurs propres besoins, passe par la transmission de valeurs d’humanité, de respect et de tolérance.

 

L'homme est ce qu'il fait comme ce qu'il ressent : bloquer l'expression de ses émotions revient à l'empêcher d'accéder à son moi intérieur (ses pensées, ses sentiments), et à une communication à l'autre. Être dans une relation saine et équilibrée nécessite de la compréhension, de l’empathie et de la sensibilité. On est d’autant plus apte à donner et recevoir de l’amour que l’on s’autorise à être authentique. Loin d’une espèce de chape de plomb sexiste qui pèserait sur les enfants pour les modeler dès la petite enfance, nous devons permettre aux garçons d’apprivoiser et verbaliser leurs émotions.


Par Aouatif ROBERT | psytherapieparis.fr

 

Aller plus loin : 

Cher parent, voici la lettre que je voudrais pouvoir t'écrire

Tu seras un homme, mon fils